Malversations financières relatives à l’achat d’avions militaires au Mali : L’Assemblée nationale met en place une commission spéciale d’enquête parlementaire

0
114
HELICO-IBK
HELICO-IBK

Réunie en séance plénière dans la salle Modibo KEITA, le samedi 5 octobre 2019, l’Assemblée nationale du Mali a adopté une Résolution portant création d’une Commission Spéciale d’enquête parlementaire en vue de mener des investigations sur des faits de détournements et de malversations financières relatifs à l’achat d’avions, d’hélicoptères et d’équipements militaires. Après avoir fixé la durée du mandat de la commission spéciale d’enquête à deux mois, l’Assemblée nationale du Mali a donné mandat à la commission spéciale d’enquête composée de 15 députés d’user de tous les moyens pour atteindre l’objectif recherché pour le bien du peuple Malien. Dans sa correspondance en date du 26 aout 20109, adressée au président de l’Assemblée nationale du Mali, le chef de file de l’opposition malienne, l’honorable Soumaïla Cissé fait état du détournement de plusieurs milliards de FCFA dans l’affaire « d’avions militaires cloués au sol ».

Il ressort de cette Résolution de l’Assemblée nationale lue par la secrétaire parlementaire, l’honorable Maïga Aziza Mint Mohamed en séance plénière que l’honorable Soumaïla CISSE, député, Chef de file de l’Opposition politique a saisi le Président de l’Assemblée nationale par lettre en date du 27 août 2019 pour la mise en place d’une commission spéciale d’enquête parlementaire en vue de mener des investigations sur des faits de détournements et de malversations financières relatifs à l’achat d’avions, d’hélicoptères et d’équipements militaires. Selon la Résolution, les faits dénoncés sont susceptibles de constituer des infractions à la loi pénale et aux procédures de passation des marchés publics. L’Assemblée nationale précise que ces dénonciations doivent être clarifiées afin d’engager toute la procédure judiciaire contre les auteurs et complices de ces faits. « Considérant la mission de contrôle de l’action gouvernementale comme une prérogative constitutionnelle de l’Assemblée nationale et qui s’exerce sur tous les aspects de la vie publique nationale. Considérant les prérogatives que confère la constitution au parlement en matière de mise en accusation de hautes personnalités pour haute trahison, crimes et délits commis dans l’exercice de leurs fonctions. Considérant l’impérieuse nécessité de rendre compte au peuple de l’utilisation des deniers publics et donc de faire toute la lumière sur les faits dénoncés. Considérant l’engagement de Ibrahim Boubacar KEITA, Président de la République dans la lutte contre la corruption, la délinquance financière, l’enrichissement illicite et toutes autres formes de dilapidation des deniers publics. Après en avoir délibéré, l’Assemblée nationale réaffirme sa ferme volonté et sa forte détermination à tout mettre en œuvre pour réussir la lutte contre la corruption et la délinquance financière », révèle la Résolution lue par l’honorable Maïga Aziza Mint Mohamed. Dans cette Résolution, l’Assemblée nationale précise qu’elle apporte son soutien aux initiatives et autres actions en cours des autorités en matière de lutte contre la corruption et la délinquance financière. Cette Résolution exhorte les honorables députés à poursuivre en toute responsabilité leurs efforts en faveur de la bonne gouvernance au Mali. En outre, l’Assemblée nationale « donne mandat à la commission spéciale d’enquête d’user de tous les moyens pour atteindre l’objectif recherché pour le bien du peuple Malien ; fixe la durée du mandat de la commission spéciale d’enquête à deux mois ; arrête le nombre de membres de la commission spéciale d’enquête à quinze repartis comme suit : RPM (5), APM (3), ASMA CFP (2), VRD (2), Adema-Pasj (1), Le Renouveau (1), Non inscrit (1) ».

Plusieurs milliards de FCFA détournés

Dans sa correspondance en date du 26 aout 20109, adressée au président de l’Assemblée nationale du Mali pour la mise en place de cette commission spéciale d’enquête parlementaire, le chef de file de l’opposition malienne, l’honorable Soumaïla Cissé, a fait savoir que le régime IBK a initié, planifié ou couvert de nombreux faits constitutifs de crimes de corruption, de détournements de deniers publics, de favoritisme, de faux et usage de faux, de trafic d’influence, d’enrichissement illicite ou de non-assistance à personnes en danger. Parmi ces faits, il a cité l’achat d’un avion présidentiel, l’achat d’équipements militaires, l’achat d’hélicoptères PUMA, l’achat d’avions SUPER TUCANO, la réparation d’hélicoptères PUMA et la formation de pilotes à des tarifs exorbitants. « En plus des PUMAS, le Mali, en juin 2015, a signé un contrat de 88,7 millions de dollars américains, soit environ 51,682 milliards FCFA (au cours en vigueur en Juin 2015), pour l’acquisition de six avions de guerre « SUPER TUCANO » sur lesquels quatre ont été livrés. La valeur totale de ces quatre avions (qui inclut aussi des prestations de service) est d’environ 68 millions de dollars. Au lieu de 51,7 milliards FCFA initialement prévu, le contrat de Juin 2015 a fait l’objet de 53,302 milliards de FCFA d’engagement et de mandatement entre 2015 et 2017 par les services financiers de l’Etat. Où sont donc passés les deux autres avions ? La valeur de ces deux avions non livrés est d’environ 20,7 millions de dollars, soit au cours actuel du dollar 11,2 milliards de FCFA. Que s’est-il passé entre temps? Un mystère que l’Assemblée nationale se doit de dissiper au plus vite », a souligné le chef de file de l’opposition malienne. De même, dit-il, le gouvernement a signé un contrat pour la formation de 15 pilotes à 3,78 milliards de FCFA. A l’en croire, des vérifications auprès d’experts suggèrent que le coût de formation d’un pilote se situe entre 20 et 35 millions de FCFA contre 250 millions de FCFA facturés. Selon Soumaïla Cissé, de 2013 à 2019, l’insécurité grandissante a occasionné la mort de plus de 4000 civils et militaires, plus de 500 pour le seul semestre 2019. « Tel est le tableau noir sur lequel s’écrivent les souffrances des enfants, des femmes et des hommes du Mali, conséquence de la corruption, du détournement des ressources de l’armée. C’est tout simplement inacceptable ! Au moment où nos forces armées tombent quotidiennement sur le champ de l’honneur, parfois faute de moyens matériels adéquats, il est inadmissible de tolérer de tels scandales. Affirmer sans ambages que notre pays est en guerre et utiliser et ou laisser utiliser à d’autres fins les fonds destinés à équiper l’armée pour qu’elle puisse faire face à l’ennemi à tout moment et partout sur le territoire national constitue un acte assimilable à une haute trahison de la part du Chef suprême des Armées susceptible d’ouvrir la voie à sa mise en accusation », a martelé l’honorable Soumaïla Cissé. Il a indiqué que l’Assemblée Nationale du Mali se doit de procéder, au regard des faits articulés et des pièces versées, à toutes les investigations utiles pour répondre aux questions suivantes : Qui a choisi et commandé les hélicoptères et avions et autres matériels et équipements militaires en cause ? Qui a ordonné les achats et à combien ? Comment se sont opérées les transactions ? Pourquoi des hélicoptères PUMA sont cloués au sol ? Pourquoi les deux avions SUPER TUCANO n’ont jamais été livrés ? « De tout ce qui précède, il appartient désormais à l’Assemblée nationale du Mali de mener toutes les investigations utiles et de renvoyer en conséquence devant les juridictions compétentes toute personne impliquée, fut-il Président de la République, Chef suprême des armées, Premier ministre, Ministre et leurs éventuels complices civils et militaires en raison des faits cités qui sont constitutifs de crimes et délits commis dans l’exercice de leurs fonctions : la haute trahison ; le détournement et la complicité de détournement de fonds publics par l’engagement irrégulier des finances publiques; l’utilisation frauduleuse de deniers publics ; l’enrichissement illicite. Ces faits sont prévus et punis par les articles 34 et suivants, 102 et suivants, 107 et suivants, 112 et suivants, 120 et suivants, 123 et suivants du Code pénal du Mali et la Loi n°2014-015 du 27 mai 2014 portant prévention et répression de l’enrichissement illicite au Mali », a conclu Soumaïla Cissé.

Aguibou Sogodogo

Source : Le Républicain

Laisser votre commentaire