Longtemps resté indécis et manquant de courage politique, le plus jeune premier ministre de l’histoire du Mali démocratique commence véritablement à sortir sa tête de l’eau en prenant courageusement et sans ambages la parole pour assener ses quatre vérités à la transition. Moussa Mara qui aurait dû être le Ousmane Sonko du Mali, car ne trainant pas de bruits de casserole et ayant acquis une certaine expertise en matière de gestion de l’Etat, a longtemps été un suiviste, mettant chaque fois sous boisseau ses ambitions et sa vision politique pour suivre la tête baissée ceux qui n’ont de programme que des slogans. Le voilà enfin sortir de l’ombre, en tout cas pour l’instant, et de la plus belle des manières. A-t-il certainement compris que le pouvoir ne s’acquiert pas dans l’indécision, le tâtonnement et la peur de s’assumer ou même d’aller en prison ? Pourquoi a-t-il pris son courage à deux mains pour critiquer certaines actions du gouvernement ?
Il ne serait nullement pas exagéré d’affirmer que Moussa Mara faisait partie des alternatives crédibles à la vieille génération, avant de surprendre désagréablement tous ses sympathisants par ses prises de position que d’aucuns ont qualifié en son temps d’irresponsable, d’incohérent, voire suicidaire politiquement. Parmi ses prises de position on peut citer entre autres son soutien à IBK au second tour alors même qu’il le qualifiait de candidat sans programme. L’acceptation du poste de premier ministre dans une majorité où il n’avait qu’un seul député et puis le travail de caniveau qu’il a abattu pour couvrir son patron de président et son régime, que ça soit dans l’affaire du Boeing présidentiel ou de celle des armements et enfin sa controversée et inopportune visite de Kidal. Ses erreurs qui ne sont pas celles de la jeunesse sont désormais des taches indélébiles dans son bilan politique et traineront derrière lui pendant longtemps. Mais comme dirait l’autre tard vaut mieux que jamais, l’ancien premier ministre commence véritablement à se ressaisir en posant des actes d’un homme d’Etat. Il ne se démarque pas de la transition, mais il a le courage de dénoncer certaines tares du régime d’exception qui gouverne le Mali aujourd’hui
Sans remettre en cause l’option prise par les autorités ; l’ancien premier ministre Moussa Mara critique certaines prises de position et certaines décisions qui sont aux antipodes de la stabilité et qui ne vont pas dans le sens de l’apaisement et de l’amélioration des conditions de vie des maliens. Parmi ces décisions on peut citer le refus de fournir à temps un chronogramme réaliste et réalisable à la CEDEAO afin d’éviter l’embargo, dont les conséquences se font sentir sur les prix des denrées de première nécessité, sur la vie socioéconomique avec la faillite des entreprises entrainant le chômage de beaucoup de maliens. La vie chère est une réalité et le Mali a des difficultés à y faire face. L’ancien premier d’IBK ne porte pas de gant pour fustiger la gestion du régime pour lui si le carburant a augmenté de façon exponentielle c’est parce que l’Etat n’a pas pu disposer des moyens pour amortir l’augmentation des prix. Il aurait des difficultés à faire face aux engrains ce qui sous-entend qu’il faut se préparer à affronter une crise alimentaire et cinq millions de maliens sont menacés de famine. Moussa Mara a non seulement pointé un doigt accusateur sur la transition dans sa brouille contre la communauté internationale, notamment la MINUSMA et surtout la crise avec la Côte d’Ivoire, mais aussi et surtout sur les conséquences des sanctions qui ont vu des entreprises allées en faillite et des maliens ont vu leurs revenus chutés. Pour l’ancien premier ministre l’Etat sera de plus en plus sollicité et les moyens feront de plus en plus défaut. Sur le plan sécuritaire des moyens colossaux doivent être mis à la disposition des forces de défense et de sécurité, alors que les indicateurs financiers sont au rouge. Il n’a pas manqué d’évoquer les revendications syndicales des travailleurs et qu’il serait possible que ces travailleurs se fassent entendre bientôt pour demander une certaine amélioration des conditions de vie de leurs adhérents. Quant à l’Etat lui-même, il doit faire face à sa colossale dette. Au PM de conclure pour dire que l’Etat aura au moins besoin de plus de 1000 milliards et ce n’est pas au Mali qu’il faut chercher, mais à l’extérieur, alors qu’on est en brouille avec l’extérieur, a laissé entendre l’ancien premier ministre Moussa Mara. Qui a fini par lancer un appel pressant à l’endroit des autorités pour qu’elles posent balle à terre afin de se réconcilier avec les partenaires traditionnels du Mali ensuite trouver un large consensus et enfin rassembler les maliens autour des objectifs de la refondation.
Youssouf Sissoko
Source : L’Alternance