Notre Mali, comme il va… Gouvernement de Transition : la nécessaire quête de crédibilité

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Mamadou Kouyaté, journaliste
Mamadou Kouyaté, journaliste

Les débuts de l’actuelle transition ressemblent dans de grandes largeurs aux derniers mois du régime IBK. Controverses et contestations aux tons de plus en plus acerbes, revendications socio professionnelles volontaires et quasi intransigeantes, rejet de plus en plus marqué du Conseil National de Transition et de certains choix de dirigeants administratifs, montée de plus en plus perceptible d’une certaine fièvre sociale.

Les héritiers d’Ibrahim Boubacar Keïta (c’est l’image déplorable que collent une grande majorité de Maliens à la junte) pourraient faire pire que leur mentor qui, selon certaines déductions, aurait passé des marchés avec eux, en échange de la protection des siens et du camouflage de certaines affaires très douteuses.

Difficile pour les observateurs de passer outre ces rapprochements. La manière dont l’inénarrable fils de l’ex-président, (enrichi au-delà de ce que peuvent imaginer ses concitoyens, arbitre de tous les marchés à milliards de la République, propulsé président de la Commission Défense de l’AN…) et le très m’as-tu vu et richissime ex-Directeur des services de renseignements ont filé entre les mailles du dispositif de sécurité, qui aurait dû isoler, jusqu’à l’éclaircissement de certaines situations, les cadors du régime défunt, a été l’un des premiers éléments déclencheurs de la spirale de méfiance, laquelle ne cesse d’enserrer les putschistes.

Moins que l’énorme matelas financier, constitué au fil des années de prévarication et de détournements de deniers publics, c’est davantage le supposé rôle joué par ‘’Bébé Doc’’ dans la disparition de notre confrère Ibrahim Touré qui est le principal grief que l’opinion nationale retient contre lui. Cette affaire, aux forts relents criminels, exige une rigoureuse enquête, qui pourrait bien révéler des imbrications mafieuses d’une gouvernance plus sulfureuse qu’elle n’y parait.

Cette investigation sera-t-elle menée ?

L’on peut raisonnablement en douter, d’autant que, selon toutes les apparences, l’on s’achemine vers la résurgence du régime IBK. Sous la poigne du seul homme politique, encore capable de sillonner le pays en finançant des actions sociales, à travers des appels à la tolérance, à l’écoute des uns et des autres et à la paix.

Remobilisation morale

Etrange transfiguration que celle qui s’affiche-opportunément-peu après le décès de Soumaïla Cissé (à qui le peuple malien se préparait à faire un triomphe à la prochaine présidentielle) et au moment où la classe politique (notamment les principaux contempteurs de l’ancien pouvoir) semble gênée aux entournures par les manœuvres des militaires visant à la rendre inopérante pour les futures compétitions électorales.

Or, le retour même d’un ersatz du régime défunt serait lourd de conséquences pour la construction du système démocratique réhabilité de notre pays dont la Transition doit, au moins, impulser les prémices.

Face à ce qui apparait de plus en plus comme un traquenard (nous reprenons ce terme de notre dernière chronique dans un but pédagogique), tendu par les putschistes pour s’assurer un avenir doré, en portant au pouvoir un politicien, qui n’a pas encore  été blanchi de certaines accusations d’enrichissement illicite et qui, de ce fait, cherche à se mettre à l’abri d’éventuelles poursuites judiciaires, une remobilisation morale de l’opinion nationale est impérative. Afin que notre nation ne soit pas condamnée à commettre les mêmes erreurs et, surtout, à travailler pour le bonheur d’un microcosme, dont le principal talent est de faire prendre des vessies pour des lanternes.

Actes forts

Le gouvernement Moctar Ouane, qui bénéficie encore de l’estime de la majorité de ses administrés, est toutefois attendu pour donner des gages de compétence et d’engagement pour conduire les différents chantiers de changement.

Le temps lui manquera certainement pour aller au bout des différentes missions assignées par une feuille de route élaborée pour rassurer les Maliens quant à la volonté de réformes et de changement. Mais, l’on attend, surtout, de l’équipe gouvernementale de poser des actes forts susceptibles d’ancrer dans les esprits et les pratiques administratives et socio politiques la possibilité et la nécessité de faire désormais mieux que ce que le pays a connu au cours des trente années d’exercice démocratique.

Le ministère des Affaires Foncières, de l’Urbanisme et de l’Habitat est en voie de passer un test déterminant pour l’ancrage des bonnes pratiques foncières. Depuis le 14 janvier dernier, le ministre, en engageant, de façon volontariste (avec la caution du gouvernement), la démolition des occupations illégales du domaine aéroportuaire, a donné un coup, à notre avis, fatal à un mythe qui avait fait reculer certains gouvernements.

Dionké Diarra, porté par une forte conviction pour sa mission de bonne gestion des biens de l’Etat, a donné des assurances pour la poursuite de l’opération de réhabilitation et de sécurisation du domaine aéroportuaire.

Face au Conseil National de Transition, il a su apporter et soutenir les arguments habilitant la finalisation du chantier.

Récupérer les biens de l’Etat

L’œuvre de rédemption, ainsi inaugurée, doit être poursuivie par la récupération des biens de l’Etat, généreusement partagés par IBK entre ses affidés, dans ses moments de ‘’délire gabegique’’. Il en va ainsi des véhicules 4×4 de luxe octroyés à des jeunes amis du fils prodigue et à des laudateurs sans vergogne.

Bah Ndaw et Moctar Ouane devraient  soutenir à fond de tels actes, fondateurs d’une bonne gouvernance, et plus crédibles que des textes, dont les Maliens ont d’ailleurs une sainte horreur. Dont la multiplication par l’équipe gouvernementale contribuerait amplement à éroder l’image tenace de l’incivisme et de l’impunité.

Mamadou Kouyaté  (koumate3@gmail.com)

Source : L’Independant

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