«Les hommes ont toujours été et seront toujours en politique les dupes naïfs des autres et d’eux-mêmes, tant qu’ils n’auront pas appris, derrière les phrases, les déclarations et les promesses morales, religieuses, politiques et sociales, à discerner les intérêts de telles ou telles classes.» (Lénine).
Depuis, la publication de la clé de répartition des quotas en vue de la composition du Conseil national de transition (CNT), les couacs retentissent de partout: qui pour s’en réjouir, qui pour être mesuré, qui pour décrier ladite clé. Au regard de ces couacs multiples, variés et souvent contradictoires, il n’est pas exagéré de dire que le gouvernement de transition a du pain sur la planche. ‘‘A quelque chose malheur est bon’’ dit un adage français.
Pourquoi des couacs à ce stade de la mise en route de la transition ?
Nul doute que si le Mali est à terre, c’est bien avant tout et fondamentalement par la faute des politiciens dans leur écrasante majorité. Ceux-ci, comme tout le monde le sait, ont fait de la politique une profession pour se faire des fortunes et se construire des châteaux en Espagne. Dès lors, ils ont enseigné aux Maliens la triste leçon que la politique est le meilleur moyen et le plus rapide créneau de réussite économique et d’ascension sociale qui brûle toutes les étapes du combat pour un meilleur devenir. La conséquence désastreuse et nauséabonde de ce raccourci c’est que l’honnêteté, la probité morale, le sens de la responsabilité et du mérite ont cédé la place à la fourberie, à l’escroquerie, à l’achat des consciences, à la courtisanerie, au favoritisme, au clientélisme, à la gabegie, à l’appât du gain, à, toutes choses qui déshonorent notre peuple et vilipendent son fondement politico-idéologique qui faisait jadis la fierté et la dignité de ce grand peuple. C’est vrai que notre peuple s’est battu pour l’édification d’une société démocratique et prospère. C’est pour cela qu’il s’est dressé comme un seul homme au sein du mouvement démocratique pour mettre fin à l’apache régime de Moussa Traoré. Pour en arriver là, notre peuple a sacrifié plus de deux-cents (200) de ses valeureux filles et fils. Ce sacrifice devrait être le leitmotiv pour un changement radical du tout au tout dans notre pays. En tout cas, tel était le cri de cœur de nos masses travailleuses aux prises avec un régime apatride dirigé par Moussa Traoré. En tout cas, le camarade John Jerry Rawlings a accompli son devoir vis-à-vis de son peuple. Il a montré à la face du monde que les Africains étaient capables de prendre en main leur destin. Contrairement à ce digne et émérite africain, voilà Amadou Toumani Touré (ATT) fouler au pied le cri de cœur d’un peuple qui a enduré dans sa chair et dans sa conscience les affres du Comité militaire de libération nationale (CMLN) et de l’Union démocratique du peuple malien (UDPM) avec à sa tête le Bureau exécutif central (BEC) pour picorer le peuple travailleur du Mali. Pour tout dire, ATT a préparé et réussi la descente aux enfers de ce peuple. La démocratie à la malienne a tout simplement souillé l’honneur et la dignité de notre peuple travailleur.
Pendant vingt- neuf (29) ans, les politiciens maliens, dans leur quasi-totalité ont abreuvé les travailleurs maliens de mensonges, de billevesées aux contours avatars. Juste pour s’inviter au mangeoire du bien public, de la chose commune. La corruption et la délinquance financière sont devenues les jeux favoris de ces démocrates mafieux aux mains trempées dans les sales affaires et dans le sang de ceux des enfants maliens qui ont donné leur vie pour la renaissance du Mali après vingt-trois (23) longues années d’hibernation, d’inertie et donc d’improductivité de toute une nation.
Pour réussir leur sale besogne, les démocrates maliens ont chanté partout dans les stades, les maisons de culte, les familles, jusque dans les chambres des villas et des taudis l’unique et seul refrain audible: ‘‘le Mali, le peuple malien et rien que leur devenir radieux’’. Quel bluff ! Lénine a coutume de dire: «Les hommes ont toujours été et seront toujours en politique les dupes naïfs des autres et d’eux- mêmes, tant qu’ils n’auront pas appris, derrière les phrases, les déclarations et les promesses morales, religieuses, politiques et sociales, à discerner les intérêts de telles ou telles classes.»
Au Mali, les régimes qui se sont succédés après la première République se sont livrés à cœur joie et au nom de la «démocratie» à la construction d’une bourgeoisie nationale arrogante se gavant sans vergogne du sang de ce peuple qui n’a que trop souffert des turpitudes de l’histoire. Les différents coups de force perpétrés au Mali par notre armée sont la suite logique et le corolaire de cette trahison de notre peuple par ses gouvernants de la deuxième et de la troisième Républiques. Parce qu’ils ont foulé au pied les intérêts fondamentaux de ce peuple ! Parce qu’ils se sont accoutumés à tout oser et tout faire au nom de la légalité constitutionnelle !
Le coup d’État du 18 août dernier contre le régime d’Ibrahim Boubacar Keïta (IBK) est la confirmation, si besoin en était, de l’échec incontestable des «démocrates» félons et caméléons au service des forces du mal contre notre peuple travailleur. Le vœu pieux de ce peuple a été exprimé dans tous les coins et recoins du Mali: laisser les militaires du Comité national pour le salut du peuple (CNSP) procéder au nettoyage de la pourriture nationale orchestrée par ces «démocrates» dénués de toute crédibilité aux yeux des masses laborieuses du Mali ! Bonjour le combat martial engagé par ces politiciens affairistes contre les jeunes militaires qui se sont donnés pour mission la refondation du Mali tombé par la faute des hommes politiques dans leur écrasante majorité s’étant acoquinés aux religieux pour avoir l’âme des Maliens. Voilà donc que le ridicule a cessé de tuer au Mali : les politiciens déprédateurs du tissu économique national crient aujourd’hui haro sur le bodet en ces termes: les militaires ne sont pas faits pour la politique; ils ont leur place au front; pas dans les bureaux (tout en feignant d’ignorer que ceux sont eux politiciens qui ont pillé notre pays. Même si des porteurs d’uniforme sont sales, ils le sont devenus sous la responsabilité des hommes politiques ! L’audit de la nation reste le meilleur remède à ces gesticulations politiciennes qui ne sont que la face théorique de leurs auteurs.
En 1991, ATT a joué sur l’état d’esprit non mûr d’un peuple à la recherche d’un bonheur confisqué. Il a professé qu’à force de laver le bébé, il coulera avec l’eau de bain. Comme pour dire qu’il n’entendait pas le cri de cœur de ce peuple qui a enduré dans sa chair et dans sa conscience les affres de l’apache régime de Moussa Traoré. Comme s’il avait un pacte avec le diable : arrêter Moussa Traoré pour mieux le sauver.
Aujourd’hui, les mêmes politiciens travaillent à torpiller la transition qui s’est mise en place assez timidement et dans le balbutiellement. Tous ceux qui sont acquis au changement, à la refondation du Mali ne sauraient voir d’un mauvais œil les militaires sonner la fin de la récréation et de la bamboula qui n’ont que trop duré et permis aux politiciens de mettre le pays à genou.
Pour ce faire, il suffit de sortir tous les dossiers montés par le Vérificateur général contre la délinquance financière et donc contre tous ceux qui se sont rendus coupables de détournements de deniers publics. À l’absence de telles mesures historiques, les membres de la transition donnent l’occasion aux politiciens véreux de continuer à pêcher en eau trouble. Ce serait donc comme si le voyageur sortait de bon matin mais sans marcher vraiment.
Les militaires qui veulent bien faire ont tout intérêt à engager la traque sans favoritisme de toutes celles et de tous ceux qui se sont nourris et qui ont nourri leurs familles des biens de notre peuple travailleur tant il est évident qu’‘‘on ne fait pas d’omelette sans casser des œufs‘’ (comme le dirait un proverbe à la vogue).
C’est en cela que réside l’issue heureuse de l’œuvre de refondation du Mali pour qu’enfin notre peuple lance son ouf de soulagement pour le mieux être socioéconomique, politique et culturel du Mali à l’avantage de ceux qui travaillent et aux dépens de ceux qui ne foutent rien.
Fodé KEITA
Source : Inter de Bamako