La théorie du complot, autour de l’implication de la France dans la gestion de la crise sécuritaire au Sahel, continue d’alimenter les débats dans la plupart des États de cette région. Pourtant, il y a pire dans ces pays que la France.
Lors d’une formation des journalistes à Bamako, en début juillet 2021, le débat était houleux autour de la présence militaire française au Sahel. Occasion pour les uns de développer des théories du complot pour faire voir la main invisible de la France derrière la crise sécuritaire dans la région. Cela pour des raisons purement géostratégiques, soutiennent-ils. Et aux autres de doigter l’irresponsabilité des dirigeants ainsi que des peuples de ces pays, qui manqueraient à leurs devoirs.
La France, une invitée
À l’issue du sommet du G5 Sahel, vendredi 9 juillet 2021, le président français, Emmanuel Macron a pourtant rappelé, au cours d’une conférence de presse, que la France n’est pas dans la région du Sahel par gaîté de cœur. « Nous restons engagés au Sahel parce que cela nous est demandé par les États de la région », a-t-il déclaré. Et de préciser à ceux qui ont tendance à perdre de vue cette évidence que « La France n’a pas de mandat, encore moins de vocation, à rester engagée éternellement au Sahel ».
Le locataire de l’Élysée a souligné par la même occasion que cet appui continu de la France aux pays du Sahel a été sollicité à maintes reprises. Notamment lors des sommets de Pau et de Ndjamena, en janvier 2020 et en février 2021, et lors du sommet du G5 Sahel du vendredi 9 juillet 2021.
Ces sollicitations répétitives de l’appui de la France aux pays du Sahel, par les dirigeants de ces États, prouvent combien ces gouvernants sont en déphasage avec une large portion de leur population. Cette frange qui demande le départ de la France de leur territoire.
Au Mali, la fin de la présence militaire française au Mali est le combat du mouvement « Yèrèwolo Débout sur les Remparts ». Un mouvement qui regroupe des représentants de plusieurs associations de la société civile, duquel est membre un député au Conseil national de Transition (CNT) du Mali.
Dans cette polémique autour de la présence militaire française au Sahel, l’erreur qu’il ne faudrait pas commettre est de tomber dans le jeu des groupes armés terroristes (GAT). Des groupes qui ne cherchent qu’à essouffler ces États afin d’arriver à leur fin. Il est temps de procéder à une véritable autocritique au lieu de continuer à tenir les autres comme responsables des maux qui assaillent cette région.
Bonne gestion des dépenses publiques
Malgré la crise sécuritaire, le budget de la défense serait mal géré dans la plupart de ces États en crise. « Doit-on accuser la France aussi dans ces mauvaises gestions ? », s’interroge un journaliste, lors de cette rencontre de début juillet, des hommes de médias à Bamako.
Le « Rapport sur le contrôle a posteriori des marchés publics au ministère de la Défense » du Niger, a révélé que 76 milliards de francs CFA ont été détournés entre 2014 et 2019. Les surfacturations représentent 48,3 milliards de francs CFA et les montants pour le matériel non-livré à 27,8 milliards FCFA. En 2014, le Bureau du Vérificateur général du Mali n’a-t-il pas révélé, dans un rapport, des points de non-conformité portant notamment sur le choix de l’intermédiaire dans l’acquisition d’un aéronef ainsi que de certaines fournitures aux Forces armées maliennes (FAMa), notamment de matériels d’habillement, de couchage, de campement et d’alimentation, ainsi que de véhicules et de pièces de rechange ?
Dans le rapport de la Coalition citoyenne pour le Sahel, intitulé « Sahel : Ce qui doit changer, pour une nouvelle approche centrée sur les besoins des populations », sous couvert d’anonymat, un officier sahélien déclare à un membre de cette Coalition que la crise dans cette région « n’est pas simplement une guerre contre les terroristes mais plutôt une guerre contre le sous-développement, l’injustice et la mauvaise gouvernance ». Selon cette coalition des organisations de la société civile sahélienne, la défense et la sécurité sont des secteurs «emblématiques de la crise de gouvernance ». Elles doivent donc être « rigoureusement soumises aux principes de bonne gestion des dépenses publiques ».
Fousseni Togola
Source: maliweb.net