Les taux de malnutrition aiguë restent plus sévères dans le nord du Mali où 25% des centres de santé ne fonctionnent pas, selon OCHA. Le Bureau de la Coordination des Affaires Humanitaires indique que Ménaka, Kidal et Mopti enregistrent les taux d’écoles fermées les plus élevés et le nombre de personnes déplacées internes dans le pays ne cesse d’augmenter. 40% des plus de 2 millions de personnes cibles se trouvent dans la région de Mopti avec un besoin global de 170 milliards de FCFA nécessaires pour faire face aux besoins humanitaires. C’est qui ressort du rapport d’OCHA sur la situation humanitaire au Mali, de janvier à février 2019.
2,3 millions de personnes ciblées à travers le Plan de Réponse Humanitaire (PRH). Cette année, les partenaires humanitaires ciblent 2,3 millions de personnes. Cette population représente 70% des 3,2 millions de personnes dans le besoin. En janvier 2018, environ 4,1 millions de personnes avaient besoin d’assistance et 1,5 million d’entre elles étaient ciblées. La réduction globale du nombre de personnes dans le besoin est due à la fois aux résultats positifs de la campagne agricole et à l’impact de l’assistance humanitaire fournie en 2018.
40% des personnes ciblées vivent dans la région de Mopti
Mopti, avec 35% de la population de la région ayant besoin d’assistance humanitaire, enregistre le plus grand nombre de personnes dans le besoin. Au total, 40% des personnes ciblées par les partenaires humanitaires se trouvent dans cette région. Là, les paysans, face à l’insécurité sont à presque trois saisons sans culture. Toute chose qui augmente le taux d’insécurité alimentaire dans la région.
56% des fonds requis sont destinés à la sécurité alimentaire et à la nutrition
Cette année, les partenaires humanitaires recherchent 296 millions de dollars, soit 170 milliards de F CFA. Ce budget est destiné à la prise en charge des communautés les plus affectées par les conséquences des conflits ainsi que des personnes touchées par l’insécurité alimentaire, la malnutrition et les inondations. La requête a augmenté de 33 millions de dollars par rapport à celle lancée en février 2018. Plus de la moitié des fonds recherchés vise à couvrir les besoins dans les secteurs de la sécurité alimentaire et de la nutrition.
Au moment de la finalisation de ce bulletin, soit le 18 mars 2019, l’appel de fonds pour le Mali n’était financé qu’à 4%. Environ 11 millions de dollars étaient mobilisés sur la requête de 296 millions de dollars.
La malnutrition nécessite une réponse multisectorielle à l’échelle nationale
Pour rappel, les résultats de l’enquête SMART de 2018 montrent que le taux de malnutrition aiguë globale chez les enfants de moins de cinq ans, bien qu’ayant légèrement baissé (10,7% en 2017 contre 10% en 2018), reste toujours dans le seuil définissant une situation sérieuse. Par rapport aux années antérieures, la situation nutritionnelle est stagnante avec une tendance à l’amélioration. Toutefois, les régions du nord restent dans une situation d’urgence nutritionnelle et enregistrent les taux de malnutrition aiguë globale les plus élevés du Mali. Il s’agit des régions de Gao, Tombouctou et Ménaka.
Dans la région de Mopti, la situation nutritionnelle a commencé à se détériorer depuis l’année dernière pour des raisons principalement liées aux conséquences des conflits intercommunautaires.
Les régions du sud bien que n’ayant pas des taux dépassant le seuil d’urgence, sont aussi dans une situation préoccupante au regard de nombre élevé d’enfants malnutris attendus qui est proportionnel à leur taux démographique. Dès lors, il est nécessaire de garder une stratégie nationale de réponse qui cible toutes les régions pour plus d’efficacité.
La lutte contre la malnutrition repose sur la prévention et la prise en charge des personnes affectées dans une approche multisectorielle intégrant, entre autres, la sécurité alimentaire, l’amélioration de l’accès à l’éducation, la santé, l’eau potable et des conditions d’hygiène et d’assainissement adéquates.
Cette réponse multisectorielle a donné des résultats encourageants dans la région de Kayes où les efforts combinés des acteurs humanitaires et de ceux du développement ont conduit à une nette amélioration de la situation. Dans cette région, le taux de malnutrition aiguë globale est passé de 14,2% en 2017 à 9,2% en 2018.
Un centre de santé sur quatre est non fonctionnel dans le nord du pays
D’importants besoins sanitaires pour les populations les plus vulnérables ne sont pas couverts en raison du manque d’accès aux services de santé de base de qualité.
Du fait de l’insécurité dans le nord du pays, 25% des structures sanitaires ne sont pas fonctionnelles 5 dans les régions de Taoudénit, Ménaka, Tombouctou, Kidal et Gao, selon les données recueillies par le cluster santé.
Dans la région de Mopti, le taux de MAG est passé de 5,8 % en 2017 à 8,9 % en 2018.
En d’autres termes, sur 287 centres de santé 66 ne répondent pas aux critères retenus pour déclarer un centre de santé fonctionnel. Ces critères incluent l’état des infrastructures, la présence du personnel et l’existence d’un paquet minimum d’activités pour soutenir les services et soins de santé.
Le manque de fonctionnement des centres de santé a pour conséquence l’accès limité aux services et aux soins de santé. A titre d’exemple, plus de 40% des femmes accouchent sans être assistées par un personnel qualifié dans les régions affectées. Aucune structure de santé non fonctionnelle n’a été rapportée pour les régions de Mopti et Ségou, au centre du pays, affectées par les conflits intercommunautaires.
Dans les régions où les centres de santé ne sont pas fonctionnels, on note une moyenne de 3,14 professionnels de santé pour 10 000 habitants. Ce ratio est en deçà des normes de l’OMS fixées à 23 pour 10 000. Cette estimation est basée sur l’incidence du paludisme, les districts avec les épidémies de rougeole, les taux d’accouchements assistés et les taux de consultations curatives.
Sur 3,4 millions de personnes vivant dans les zones affectées par les conflits à Gao, Kidal, Mopti, Tombouctou et le district de Niono avec la commune de Nampala, 1,4 million pourraient avoir un besoin urgent d’assistance médicale en 2019.
257 000 enfants privés d’écoles à cause l’insécurité
La détérioration de la situation de l’éducation constitue un défi majeur en dépit du travail réalisé par les acteurs du système éducatif. Dans les régions du nord et du centre, les infrastructures et le matériel scolaires ainsi que les ressources humaines sont parfois la cible d’attaques.
En février 2019, quelque 857 écoles sur un total de 8 421 étaient fermées pour des raisons principalement liées à l’insécurité dans les régions de Koulikoro, Ségou, Mopti, Gao, Ménaka, Tombouctou et Kidal. La région de Mopti, à elle seule, enregistre plus de la moitié de ces écoles.
La fermeture des écoles prive plus de 257 000 enfants de leur droit à l’éducation. De façon générale, il convient de noter aussi que l’année scolaire est perturbée par une grève des enseignants, en cours, depuis janvier.
Les défis à relever par le cluster éducation sont liés à la sécurité, la mobilisation des enseignants dans les communes affectées ainsi que les capacités et conditions d’accueil des enfants (y compris les cantines scolaires, les latrines et les infrastructures d’apprentissage).
L’insécurité fait du Mali un pays d’origine et un pays d’accueil des réfugiés
Depuis le début de la crise sécuritaire en 2012, des milliers de maliens ont traversé les frontières pour trouver refuge dans les pays limitrophes.
Selon le HCR, 136 737 réfugiés maliens ont été enregistrés au Burkina Faso, au Niger et en Mauritanie au 28 février 2019.
Au total, 71 158 maliens anciennement réfugiés dans les pays voisins sont volontairement revenus au Mali depuis 2013.
Parallèlement aux flux de réfugiés maliens, le Gouvernement, à travers la Commission Nationale Chargée des Réfugiés (CNCR), a enregistré 8 457 réfugiés burkinabés et 1 024 réfugiés nigériens. Ces personnes ont également fui les violences dans les zones frontalières avec le Mali plus connues sous le nom de la région du Gourma Rarhous. Elles sont installées dans les zones d’Intillit et de Gossi respectivement dans les régions de Gao et de Tombouctou.
Les défis majeurs rencontrés dans l’assistance aux réfugiés incluent la documentation d’état civil (pour les enfants notamment), la scolarisation des enfants, la sécurité physique des personnes et des biens, les moyens d’existence et d’autosuffisance, le renforcement de structures communautaires de protection (y compris de l’enfant, les violences basées sur le genre etc.) et l’accompagnement des personnes ayant des besoins spécifiques. Le HCR et ses partenaires, en appui à la CNCR du Mali, continuent d’apporter l’assistance d’urgence nécessaire aux réfugiés.
L’augmentation des déplacements internes et leur durée accroissent les besoins humanitaires
Le nombre de personnes déplacées internes (PDI) a significativement augmenté depuis l’année dernière. Il est passé de 47 700 en janvier 2018 à plus de 123 500 en janvier 2019, soit une augmentation de 158 pour cent, selon le rapport de la
Commission Mouvement de Population (CMP) publié le 14 février. Le Mali n’avait pas atteint un chiffre aussi élevé de PDI depuis 2015.
La situation reste préoccupante dans la région de Mopti où les conflits intercommunautaires et les activités des acteurs armés continuent d’engendrer de nouveaux déplacements de personnes à l’intérieur de la région et dans d’autres régions y compris le district de Bamako et Koulikoro.
A titre de rappel, la région compte aujourd’hui 56 495 PDI contre 2 151 l’année dernière à la même période. Depuis mi- décembre 2018, ces conflits ont entrainé le déplacement de plus de 650 personnes vers le district de Bamako et la région de Koulikoro. Ces nouveaux arrivants s’ajoutent aux 3 023 personnes déjà enregistrées à Bamako et aux 1 162 autres dans la région de Koulikoro. Lien pour plus d’informations sur la situation des PDI à Bamako et Koulikoro.
En février 2019, la CMP a enregistré de nouveaux déplacements de personnes toujours liés à l’insécurité et aux conflits intercommunautaires dans le cercle de Bourem, région de Gao et dans le cercle de Kita, région de Kayes.
Le nombre de PDI ne cesse d’augmenter depuis janvier 2018. En revanche, les données de la CMP n’ont indiqué aucun retour de PDI durant cette même période. Cette situation montre que la durée des déplacements devient de plus en plus longue. La plupart des PDI et les communautés hôtes, surtout celles vivant dans le nord et le centre du pays, sont dans une situation de vulnérabilité aiguë. Elles ont dû tout abandonner-y compris leurs moyens de subsistance- en s’éloignant des violences. La situation sur le plan alimentaire et nutritionnelle est si grave que les chiffres du Cadre Harmonisé de novembre 2018 7 sont en train d’être revus à la hausse pour des raisons liées, en partie, aux conflits et aux déplacements internes de personnes. Les chiffres révisés seront publiés dans le courant du mois de mars.
L’accès humanitaire est possible mais nécessite des stratégies adaptées
OCHA a organisé une série de discussions (Focus Group) avec les partenaires humanitaires sur les contraintes d’accès au Mali 8, en janvier 2019. Les participants à ces discussions comprennent environ 130 personnes travaillant pour les agences du système des Nations Unies et les ONG.
Les questions portaient sur la capacité d’accès des acteurs humanitaires par commune et les contraintes principales auxquelles ils étaient exposés. Les résultats permettent de dégager des tendances générales. Les informations recueillies montrent que l’accès humanitaire est le plus souvent possible, mais peut être très complexe et peut aussi nécessiter des stratégies adaptées en fonction des dynamiques locales, du type d’acteur humanitaire et du type de programmes.
Les défis identifiés comprennent, entre autres, des limites à la liberté de mouvements, des contraintes liées aux infrastructures et aux aléas climatiques, des influences locales sur la nature des programmes ou le recrutement du personnel et les risques liés aux engins explosifs. Il est important de noter que les acteurs humanitaires ne sont généralement pas visés par la violence. Ils peuvent toutefois être ciblés par la criminalité.
Les discussions révèlent que de manière générale, une communication et des interactions plus accrues avec tous les acteurs et basées sur les principes humanitaires est essentiel. Aussi, d’après les acteurs humanitaires, une approche plus consistante entre ces derniers est jugée nécessaire afin d’éviter que les pratiques d’une organisation n’aient un impact négatif sur l’ensemble de la communauté humanitaire.
Enfin, une meilleure communication et un partage régulier des bonnes pratiques et expertises entre les acteurs humanitaires sur les contraintes et les stratégies d’accès devraient permettre de mutualiser les efforts. Les zones les plus difficiles à accéder sont situées au centre et au nord.
Les civils sont de plus en plus touchés par les incidents liés aux engins explosifs
Depuis mi-2017, le nombre d’incidents liés aux engins explosifs a considérablement augmenté dans les régions au centre du Mali. Ces incidents provoquent souvent un nombre élevé de victimes civiles. En 2018, 249 civils ont été victimes, soit presque le triple du nombre de victimes enregistré en 2017. Au Mali, une victime d’engins explosifs improvisés sur trois est un civil.
Les enfants, en raison de leur mobilité et de leur manque de perception des risques, sont souvent plus exposés aux risques posés par les engins explosifs. De ce fait, les activités de lutte antimines mettront cette année un accent particulier sur leur protection, à travers un projet visant l’inclusion de l’éducation aux risques dans les programmes scolaires. Ces activités permettront de renforcer la capacité du Gouvernement dans le développement de modules de formation pour les écoles fondamentales et de mettre en œuvre la déclaration sur la sécurité dans les écoles, initiative à laquelle le Mali a adhéré en février 2018.
La Rédaction avec OCHA
Source: L’Evènement