Invité par nos confrères de la chaîne Africable sur la question « le Sahel à l’épreuve du terrorisme », l’ancien premier ministre Soumeylou Boubèye Maïga a donné une leçon de géopolitique sur la stratégie des terroristes dans le Sahel. Toutefois, il a donné des pistes de solutions pour conjurer l’hydre du terrorisme dans la bande sahélo-saharien.
Quid de la prolifération des attaques meurtrières contre les militaires maliens et la récente mort des 13 militaires français de l’opération Barkane, l’ancien premier ministre de rétorquer que depuis 2018, moment où il était à la tête de l’exécutif, son gouvernement a constaté une recrudescence de l’action des terroristes dans le Sahel avec un débordement dans les pays méridionales et une expansion sur l’Afrique centrale. Pour lui, la vulnérabilité du Mali aux attaques djhadistes s’explique par le fait qu’il est au cœur du Sahel. « … Malgré tous les efforts consentis par l’Etat et le forces armées maliennes, on voit que la situation sécuritaire se détériore », a déploré le Président de l’ASMA-CFP, qui a ajouté que du début de l’année à nos jours, le Mali a enregistre un peu moins 750 actions imputées aux activités terroristes faisant ainsi le triple des attaques terroristes enregistrées l’année précédente. Pour lui, ce phénomène en constance augmentation est dû aux connexions fortes qui existent entre les différents groupes terroristes, les réseaux mafieux et les trafiquants.
L’ancien premier croit comme fer que cette situation sécuritaire ne se réglera que dans la durée et demande que le Mali adapte la réponse à la situation. « Parce que les forces que nous avons au Mali comme dans la sous-région n’ont pas été configurées depuis le stade de l’instruction et pendant la formation pour faire face au type de menace dont nous sommes confrontés maintenant », a-t-il déclaré.
« Casser le cordon-ombilical entre les groupes terroristes et les populations »
Question sur la coordination au sein des groupes terroristes qui semble prendre le dessus sur la convergence des forces nationales et étrangères, Soumeylou Boubèye Maïga de répondre que ces différentes armées font face à un ennemi qui est incrusté dans la population rendant son éradication difficile par l’armée. Pour ce faire, il proposera que la primauté de l’action militaire doive casser le cordon-ombilical entre les groupes terroristes et les populations. A cela, dit-il, il faut apporter des perspectives politiques et économiques aux populations des localités au cœur de l’action du terrorisme.
Toujours selon lui, la zone de Tessalit en passant par Ténenkou, Léré jusqu’à Tinzanga est conflictuel depuis plus de 10 ans, totalement déstructurée sur le plan politique, économique, sociologique qu’il faut impérativement résoudre. A l’en croire, l’agenda des groupes terroristes dans le Liptako Gourma est de procéder à la création d’un vide administratif pour installer des nouvelles routes de trafics. L’ancien premier ministre s’est livré sur le plateau d’Africable à une véritable leçon de géopolitique en citant des pistes sur la stratégie des terroristes qui, selon lui, profitent du vide administratif pour faire circuler les produits illicites du Bénin en passant par le Burkina, le Mali, Niger jusqu’à l’extrême sud de l’Algérie.
Par ailleurs, répondant au déploiement de l’opération « Takuba » dans la zone des trois frontières, l’ancien-chef de l’exécutif Malien affirme qu’il n’y a pas d’alternative à la coopération internationale dans la lutte contre le terrorisme dans la région. Quant à la réticence des populations à cette nouvelle force, il dira qu’il faut procéder à une évaluation pour convenir à la même clé de lecture de la situation et de s’interroger sur lune coordination qui mettra en première ligne les Etats concernés par la crise. « Dans la lutte contre le terrorisme tant qu’il n’y a pas une légitimation de l’action publique par les populations, son soutien indispensable ne peut porter des succès escomptés », a-t-il insisté.
« Pas d’alternative au dialogue nationale inclusif »
Quid du dialogue national inclusif prévu pour le 14 décembre prochain, Soumeylou Boubèye Maïga de rappeler qu’il a été sollicité par toutes les forces vives du pays suite aux contradictions nées au lendemain de l’élection présidentielle de 2018 et la situation sécuritaire qui menace la survie de la Nation. Il a aussitôt affirmé la participation sans condition de son parti au dialogue qui, selon lui, n’est pas une négociation entre les camps opposés, mais plutôt un débat entre citoyens Maliens qui a toutes les chances d’aboutir à un consensus. A l’en croire, tant que la date du 14 décembre n’est pas arrivée, toute porte à croire que le plaidoyer des autorités pour y faire participer toutes les forces récentes pourra aboutir. « Quelle est l’alternative au dialogue ? », s’interroge celui qui a conduit avec brio la mission d’observation de la CEDEAO à la récente présidentielle de Guinée-Bissau. Pour lui, l’inquiétude de certains sur l’application des résolutions du DNI est levée parce que, soutient-il, le Président de la République a dit qu’il se porte garant de la mise en œuvre de ces recommandations par le biais d’un mécanisme de suivi. « Le Président de la République ne peut pas inviter tous les Maliens au dialogue et ne pas tenir compte de ce qui sera dit. Cette inquiétude ne me paraît pas fonder », a conclu SBM sur cette question, qui invite les Maliens à garder espoir et faire confiance à la résilience des FAMa pour venir à bout de cette situation qui certainement va durer.
Siaka DIAMOUTENE
Source : Maliweb