La prévarication, l’oligarchie, la mauvaise distribution des ressources de l’Etat, le manque de vision et de priorisation dans la gestion des affaires de l’Etat. Voilà, entre autres, les maux que le peuple malien vit sous cette transition dirigée par Bah N’Daw.
Secoué par la rébellion déclenchée en janvier 2012, le régime d’Amadou Toumani Touré, ATT, a été combattu, parce que jugé incompétent pour faire face à la crise. Il fini par laisser sa peau dans cette affaire. Ainsi, cette rébellion muée en terrorisme a eu de l’ascension sous la transition civile dirigée par le Pr Dioncounda Traoré, en 2012. Ainsi, le peuple a réclamé Ibrahim Boubacar Keïta qui jouissait d’une crédibilité inébranlable. A l’issue du scrutin présidentiel de 2013, IBK est élu avec un score sans appel, plus de 77% des suffrages exprimés. Pendant sept longues années, hormis la signature de l‘Accord pour la paix et la réconciliation nationale ayant permis un cessez-le-feu entre l’armée régulière et les rebelles, presque rien d’autre n’a bougé en faveur du Mali. Aussi, l’investissement de plus de 1 200 milliards de FCFA pour l’équipement de l’armée n’aura pas suffit pour résoudre cette crise ou calmer le jeu. Bien au contraire, les foyers de tension ont connu une extension du nord au centre du pays. Face à cette situation dramatique, couplée à des forts soupçons de corruption au haut sommet de l’Etat, le peuple a commencé à s’agiter de nouveau contre ce régime.
Les mouvements de contestation initiés par le M5-RFP ont servi à un groupe d’officiers pour s’emparer du pouvoir le 18 août 2020.
Fondant l’espoir sur la capacité de ce groupe de colonels à diligenter des actions pour faire face à l’insécurité récurrente, la population a vite déchanté. Les nouvelles autorités, après des manœuvres dilatoires, finiront par garder tous les leviers du pouvoir. Trois petits mois ont suffit pour découvrir la cupidité des nouveaux dirigeants.
Depuis le coup de force contre IBK, les lignes sur le front n’ont pas bougé en notre faveur. Le centre du pays s’embrase davantage. Pire, outre les enlèvements et exécutions sommaires, des forces obscurantismes se livrent à des scènes abjectes. Elles dynamitent les ponts et incendient les champs de culture. Aussi intriguant que cela puisse paraître, ces atrocités ne se butent à rien que le silence coupable des autorités de la transition dominée par les militaires. Les cas de Farabougou, Dogofry et environnants illustrent cette page sombre de notre histoire. Cet immobilisme, cachant certainement une incapacité notoire des tenants du pouvoir, laisse croire que nous allons droit dans le mur. Et qu’il faut un nouveau sursaut national afin d’éviter le pire au Mali. Car l’attitude de cette transition aphone prouvant inélégamment son manque de vison et d’orientation ne pourrait qu’être préjudiciable pour la patrie.
L’opinion populaire conclut que ce qui intéresse les autorités transitoires est le partage de gâteau : comment faire pour avoir la mainmise sur le Conseil national de transition ? Comment contrôler les directions nationales et profiter du luxe de Bamako, au détriment du théâtre des opérations, où ils sont attendus par des populations martyrisées ?
Boulimie du pouvoir
Les attributions des membres du cabinet du Vice-président dont l’efficacité demeure incertaine sont des motifs à vomir la démarche budgétivore de la transition militaire en cours. Nonobstant les réticences de la population face à la mise en place de ce cabinet du vice-président, un communiqué officiel a été pondu pour déterminer les attributions dudit cabinet. Qui du reste n’est ni nécessaire ni indispensable.
Parlant du rôle des membres du cabinet du Vice-président, l’article 5 du décret précisant les attributions du Colonel Assimi Goïta indique : « Les membres du Cabinet sont nommés par décret du président de la transition sur proposition du Vice-président ». L’article 6 précise que le Directeur de cabinet du Vice-président de la transition assure le suivi des dossiers qui lui sont confiés par le Vice-président de la transition. Selon le même article, le Directeur de cabinet a pour attributions : « L’organisation des contacts personnels du Vice-président de la transition, la supervision de l’organisation matérielle des déplacements du Vice-président de la Transition à l’intérieur du pays et à l’étranger, en rapport avec le Secrétariat général de la présidence de la République, la préparation des réunions tenues sous la présidence du Vice-présidence de la transition, il en rédige notamment les comptes rendus ou procès-verbaux. Il veille ensuite à l’application des instructions du Vice-président relatives aux matières relevant des attributions, enfin le suivi des relations du Vice-président de la transition avec les organisations de la société civile et les confessions religieuses ».
Selon l’article 7, le Directeur de Cabinet a rang de ministre. L’article 8 stipule qu’il signe les correspondances relatives aux matières pour lesquelles il a reçu délégation du Vice-président. Dans l’article 9, les conseillers spéciaux sont chargés de l’étude, de l’institution et du suivi des dossiers. Leurs attributions spécifiques sont fixées, au besoin, par une instruction du Directeur de cabinet du Vice-président de la Transition.
L’article 10 rapporte que les chargés de mission assistent les conseillers spéciaux. L’article 11 prévoit que le Secrétaire particulier tient l’agenda du Vice-président de la Transition. Il assure aussi le classement des dossiers du Conseil des ministres, des autres réunions interministérielles ainsi que tout autre document à lui confié par le Vice-président de la Transition. Il a rang de chargé de mission.
Selon l’article 12 du décret, l’attaché de Cabinet suit toutes les questions personnelles à lui confiées par le Vice-président de la Transition. Dans l’article 13, on rappelle que les conseillers spéciaux, les chargés de mission et l’Attaché de Cabinet sont placés sous l’autorité directe du Directeur de Cabinet.
Ensuite, dans l’article 14 on peut lire que l’Aide de camp est chargé des affaires privées du Vice-président de la Transition. Il peut être aussi assisté par un adjoint. Ils sont exclusivement choisis parmi les officiers de l’armée, de la Gendarmerie nationale ou encore de la Garde nationale. L’Aide de Camp et son adjoint sont nommés par décret du Président de la Transition sur proposition du Vice-président.
L’article 15 stipule que le Secrétaire particulier du Vice-président de la Transition est chargé de réaliser les travaux de dactylographie, de classement et de conservation des archives propres du Vice-président et courrier classé « Secret » adressé au Chef de l’institution. Il exécute aussi toute tâche à lui confiée par le Vice-président de la Transition. Il a rang de conseiller technique et relève de l’autorité directe du Vice-président. Il dispose ensuite d’un assistant nommé par décret du président de la Transition, qui a rang de chargé de mission.
On peut aussi lire à l’article 16 que dans l’ordre de préséance, les conseillers spéciaux, les chargés de mission et l’Attaché de Cabinet du Vice-président prennent rang immédiatement après les agents auxquels ils ont été assimilés au niveau de la Président de la République.
L’article 17 affirme qu’une instruction du Président de la Transition détermine les rapports fonctionnels entre le Vice-président, l’Etat-major particulier et les directions des services des renseignements. En outre, l’article 18 montre que les dépenses de fonctionnement de la Vice-présidence de la Transition sont prises en charge sur le budget national.
Le cas du ministère de la Réconciliation
Le Département dédié à la réconciliation ne donne pas bonne impression. Car, à ce niveau, on confond vitesse et précipitation à travers des nominations fantaisistes. Il s’agit notamment des capitaines d’aviation qui abandonnent les airs au profit des bureaux climatisés, des combattants entassés aux abords du bâtiment abritant ledit Département, comme une façon de dire : ‘’nous avons eu ce que nous cherchions, débrouillez-vous’’. En tout cas, ce qui se passe au niveau de ce département n’est guère rassurant.
De toute évidence, cette transition se montre aussi budgétivore que le régime sortant. Il ne se veut pas non plus rassurant. Au contraire, à cette étape de la transition qui doit hâter les pas, on note une nonchalance qui cacherait le manque de vision des nouvelles autorités maliennes.
Oumar KONATE
Source : La Preuve