On attendait une réaction du président de la République au » projet d’accord clair de partage de responsabilités assorti d’une feuille de route transparente connue de tous » que le FSD et la CoFoP (opposition) lui avaient fait parvenir au sortir des consultations ayant suivi la démission de Soumeylou Boubèye Maïga et de son gouvernement; le 18 avril dernier. ·
En ses lieu et place, c’est le nouveau Premier ministre, Dr Boubou Cissé, qui s’est manifesté par un « projet de protocole d’accord » entre lui et les regroupements et partis politiques, les mouvements signataires de l’accord pour la paix et la réconciliation, les regroupements de la société civile, les entités religieuses, les partenaires sociaux.
C’est déjà une première déception et de taille pour les leaders de l’opposition qui avaient espéré et pour certains plaidé pour que IBK lui même soit en première ligne dans cette affaire. Ça ne sera pas le cas mais il y a pire : le gouvernement qui sera mis en place comprendra certes des personnalités issues des groupements et partis politiques mais il travaille ra à la mise en œuvre du programme 2018 23 du président de la République intitule: « Ensemble pour la paix et le progrès : Notre grand Mali avance « .
Le vœu d’un dialogue politique national inclusif de l’opposition est pris en compte. Mais c’est le président qui en » proposera le format approprié » et ses recommandations, plutôt que de conduire à un chamboulement institutionnel redouté par les tenants du pouvoir, viendront s’inscrire dans le renforcement des actions initiées par le gouvernement.
Enfin relevons ce point : » Le présent accord est conclu pour une durée indéterminée. Il cessera cependant de produire son effet si le Premier ministre et son gouvernement venaient à démissionner« .
A l’évidence ce protocole d’accord a été conçu et rédigé pour tenir le président de la République éloigné de la turbulence politique du moment. Ni son mandat ni ses prérogatives ne seront affectés par le sort qui en sera fait. Il n’est directement comptable ni de son succès ni de son échec. C’est son Premier ministre qui en répond. Ce texte convient parfaitement au dessein politique recherché : un gouvernement qu’i·l veut de » large ouverture ». Laquelle sera mesurable au nombre et à la qualité de ses parties prenantes.
Il est aux antipodes du » projet d’accord politique clair de partage de responsabilités » élaboré par les deux pôles de l’opposition politique qui conviendrait plutôt à un gouvernement d’union nationale. Et dont la réussite ou le revers engagerait le président de la République, premier signataire du document.
D’autant plus que l’URD, le parti de Soumaïla Cissé, a souhaité que lui soit conféré un caractère » contraignant ». Sans doute pour mieux contrôler le président qui a désarçonné ses interlocuteurs en présentant son nouveau Premier ministre comme « consensuel » alors que, à les entendre, il ne les a ni » consultés ni associés » à son choix.
IBK n’étant pas dans la logique de » partager des _ responsabilités » pour répondre efficacement à une crise multidimensionnelle mais de distribuer des strapontins pour calmer des ardeurs, a répondu de la façon qui lui semble appropriée pour conserver l’essentiel de son pouvoir.
Mais le Mali ne peut rester trop longtemps sans· gouvernement (ce qui serait préjudiciable à tous). Aussi les parties concernées par l’épreuve en cours doivent-elles fournir l’effort supplémentaire de rapprocher leurs vues. Si besoin, avec l’appui de bonnes volontés locales (il en existe encore) et de partenaires internationaux dont la MINUSMA. Elle est déjà intervenue dans la sphère politique malienne lors de la présidentielle de 2018 d’une façon jugée fort utile.
Par Saouti Haidara.