Une étape importante vers la monnaie unique a été franchie le 21 décembre 2019, lorsque le Président ivoirien et actuel Président en exercice de l’UEMOA, Alassane Ouattara, et le Président français, Emmanuel Macron, ont annoncé la réforme du franc CFA, la monnaie commune aux huit pays membres de l’UEMOA. 134 millions de personnes au Bénin, au Burkina Faso, en Côte d’Ivoire, en Guinée-Bissau, au Mali, au Niger, au Sénégal et au Togo utilisent le franc CFA. Le franc CFA sera renommé « éco » ; la France se retirera de tous les organes de gouvernance et la moitié des réserves de change ne seront plus détenues par la Banque de France. L’éco continue cependant d’avoir une parité fixe avec l’euro et la France garde pour le moment son rôle de garant financier.
Créé en 1945, sous le nom de « Franc des colonies françaises d’Afrique » et devenu en 1958 « Franc de la Communauté financière africaine », le changement de nom de la monnaie commune est hautement symbolique. Le projet de réforme prévoit de réduire les liens financiers avec l’ancienne puissance coloniale. Cependant, de nombreux économistes africains pensent qu’il ne devrait plus y avoir aucun accord de coopération monétaire entre la France et les pays africains. « Avec le maintien de cette garantie, en attendant l’éco, nous voulons éviter la spéculation et la fuite des capitaux », a expliqué Alassane Ouattara. D’autres voix critiques affirment que la réforme du franc CFA ne va pas assez loin, notamment en ce qui concerne le taux de change fixe avec l’euro qui rendrait les exportations ouest-africaines moins compétitives.
Au niveau international, la réforme du franc CFA a été saluée par la Banque africaine de développement ainsi que de nombreux autres partenaires financiers. Le FMI l’a considérée comme « un pas important dans la modernisation d’accords de longue durée » entre l’espace UEMOA et la France.
Au niveau régional, la réforme de la zone monétaire UEMOA facilitera son intégration dans la future zone monétaire de la CEDEAO qui a déjà été décidée en 2003 avec notamment la création d’une monnaie unique appelée également « éco ». Lors de la 56e session ordinaire de l’Autorité des chefs d’État et de gouvernement, le 21 décembre 2019 à Abuja, les responsables ouest-africains ont pris des mesures pour accélérer la création de l’Union monétaire de la CEDEAO en 2020. Ils ont adopté le symbole de l’éco, la monnaie unique de la CEDEAO et le nom de la Banque centrale de la CEDEAO : la Banque centrale de l’Afrique de l’Ouest (BCAO).
Les économies ouest-africaines peinent cependant à remplir les critères de convergence, notamment un déficit public inférieur à 3 %, un taux d’inflation inférieur à 10 % et une dette représentant moins de 70 % du PIB national. L’introduction d’une monnaie unique a déjà été reportée maintes fois. La réforme du franc CFA ne représente ainsi qu’un pas important dans la construction de la nouvelle monnaie plus englobante de la CEDEAO et la question cruciale est de savoir si les économies anglophones rejoindront la nouvelle monnaie dans un futur proche. Si le géant économique qu’est le Nigéria a requis du temps pour analyser les implications de la réforme du franc CFA, le Ghana, la deuxième économie la plus importante de la région, a confirmé son soutien. « C’est une décision bienvenue que le Ghana applaudit chaleureusement. […] Nous, au Ghana, sommes déterminés à faire ce que nous pourrons pour pouvoir rejoindre bientôt les États membres de l’UEMOA dans leur usage de l’Eco car nous pensons qu’il permettra d’éliminer les barrières commerciales et monétaires, de réduire les coûts des transactions, de stimuler l’activité économique et d’élever le niveau de vie de nos populations », affirme un communiqué de presse du gouvernement.
Source : 22 Septembre