Déjà dans son préambule, ce projet de feuille de route, libellé sous forme d’accord politique, sort du déni et reconnaît que « le Mali traverse une période difficile de son histoire, période caractérisé par de multiples défis… ».
Parmi ces défis nous citerons entre autres les besoins sociaux de base d’une population majoritairement jeune (éducation, formation, emploi, santé, habitat…), sécuritaires dus au terrorisme, économiques, sanitaires avec une place prépondérante pour le processus de paix et de réconciliation nationale.
Dans son contenu, des propositions ont également été faites pour améliorer la gouvernance avec une gestion partagée et consensuelle des affaires de l’état entre la majorité (50%), l’opposition (30%) et la société civile (20%) pour ce qui est de la composition du gouvernement.
Il est fait également référence et mention aux résolutions et recommandations du DNI comme véritable boussole.
Cette feuille de route prend également en compte les revendications et doléances récurrentes des travailleurs.
Rassemblement National |
Le document appelle à un rassemblement national tel que souhaité par le président de la république et essentiel pour la survie même de l’Etat : « L’immensité et l’acuité des défis auxquels le pays est confronté, imposent aux pouvoirs publics, aux acteurs politiques et de la société civile de toutes obédiences, de conjuguer leurs énergies et les intelligences pour sauvegarder le Mali en créant les conditions de la stabilité politique pour répondre aux aspirations profondes du peuple ». Sur quatre points essentiels, la liberté, la justice, la démocratie et à la satisfaction des besoins fondamentaux auprès des populations recensés.
Le document détermine les engagements des différentes parties pour ce qui est des objectifs assignés à la feuille de route dans le strict respect du cadre démocratique, républicain et constitutionnel.
Il propose une synergie d’action des différents acteurs politiques et sociaux afin de travailler à consolider « les conditions d’une gouvernance vertueuse » et un environnement propice au renforcement des institutions afin de mieux faire face à la crise sécuritaire.
Pour répondre à la demande de l’opinion malienne et internationale, l’accord prévoit une intensification des efforts pour la libération de Soumaila Cissé.
La recomposition de la cour constitutionnelle, ensuite de l’Assemblée nationale suite aux travaux de la nouvelle cour constitutionnelle, l’élection d’un nouveau président de l’assemblée nationale sur le principe d’une personnalité consensuelle, le Renouvèlement des bureaux des commissions de l’assemblée nationale, sont toutes des questions dont des propositions concrètes ont été formulées dans ce projet de feuille de route. Et cela dans le respect de la constitution, des textes, des recommandations de la CEDEAO et des revendications du M5-RFP.
Mise en place d’un Gouvernement d’union nationale. |
Pour ce qui est de la formation du nouveau gouvernement, il est précisé que « le premier ministre choisira sur proposition des partis, regroupements politiques, des ministres qui formeront le prochain gouvernement sous sa direction »
Toute fois, une clause y est instaurée pour faire face au nomadisme politique et aux jeux d’intérêt. Elle prévoit sanctionner les ministres démissionnaires de leurs partis respectifs alors que nommés sur proposition de leurs regroupements. Le cas échéant, le ministre est remplacé suivant le même principe pour sauvegarder et consolider l’alliance politique autour des priorités essentielles, consensuelles et acceptées de tous à travers un accord politique que le Chef de l’Etat, par sa volonté d’unir les maliens autour de l’essentiel, a qualifié de « Rassemblement National ».
Toutefois, il est à préciser qu’en retour, que toute « entité représentée au sein du gouvernement ne peut obliger son préposé à démissionner ou le remplacer selon son bien vouloir… ».
Le Gouvernement quant à lui pourra le révoquer en cas de faute professionnelle et proposer son remplacement au Président de la république.
Mesures politiques |
Sur le plan politique, pour répondre aux revendications électorales du M5-RFP et conformément aux recommandations de la CEDEAO, conscients que l’arrêt de la cour constitutionnelle ayant réformé les résultats du second tour des législatives dans certaines circonscriptions est à la basé de la crispation sociopolitique actuelle, et suite à l’annonce du président de la république.
Pour ce faire, et pour répondre à certaines revendications, la feuille de route propose l’adoption d’un nouveau code électoral, la réforme de la cour constitutionnelle, la création d’un organe unique indépendant de gestion des élections, l’organisation de nouvelles législatives à l’issue de ce processus de réformes, la création d’un conseil national de dialogue politique qui constituera un cadre d’échanges et de consensus sur les grands sujets.
Lutte contre la corruption |
La lutte contre la corruption et la mauvaise gouvernance est également au centre des mesures fortes pour toujours répondre à une demande croisée et partagée par la majorité des regroupements, des citoyens et même de la communauté internationale.
Accord pour la Paix et la Réconciliation issu du processus d’Alger |
Le Gouvernement devra également s’atteler à susciter un consensus de toutes les parties à travers une plus grande appropriation de l’opinion nationale autour de l’accord pour la paix et la réconciliation nationale issu du processus d’Alger afin de pouvoir accélérer sa mise en œuvre dans un mouvement d’ensemble compris et accepté de tous.
Il faut le dire, l’une des principales raisons du rejet de l’accord issu du processus d’Alger par l’opinion, est le déficit de communication qui a précédé et accompagné la signature de l’accord. Ces problèmes de perception ont tout complément contribué à un rejet de l’accord par les populations pour la simple et bonne raison que pour beaucoup, c’est un accord dont la mise en œuvre, divisera le Mali. Ce qui est faux et tant que les maliens ne seront pas suffisamment informés sur le contenu et les objectifs de l’APR, ces doutes et ces réticences subsisteront et constitueront certainement au point de blocage futur.
Dialogue avec les Djihadistes |
Le point saignant de cette offre politique est la responsabilité «d’engager le dialogue avec les djihadistes maliens » et cela sans détour comme le dit précisément le texte. En effet, c’est l’une des problématiques de la résolution de la crise au Mali, que seul le DNI a pu légitimer et empêcher ainsi la communauté internationale à s’opposer à cette volonté populaire dont le Premier ministre vient de prendre la responsabilité d’en faire désormais un objectif politique.
Cela est à saluer sans conteste.
Éthique et responsabilités |
Il est également prévu que « la partie qui estime qu’un autre signataire viole les termes de l’accord » devra saisir le premier ministre, ou saisir le président de la république, si c’est le premier ministre qui est mis en cause.
Comme quoi, le Premier ministre, s’est imposé à lui-même une autorité légitime, celle du président de la république comme recours à un éventuel manquement de sa part pour ce qui est de la conduite de cet accord proposé aux parties.
Apaisement social |
Concernant l’apaisement social, il fait recours à l’apaisement du front social autant dans les secteurs public que privé.
Ainsi, il est précisé que le Gouvernement engagera des consultations en vue d’améliorer les conditions de travail, de vie et d’accompagnement de l’ensemble des travailleurs de la fonction publique d’une part et du secteur privé d’autre part.
Et cela touche les revendications salariales, des conditions de travail, des bénéfices, indemnités et pensions dans le but de « procéder à une « ré fondation du cadre légal et réglementaire du monde du travail passant par une amélioration de la rémunération du travail sans pour autant mettre en cause les droits déjà acquits par les travailleurs ». En un mot, une revalorisation du fonctionnariat mis en charge avec des propositions concrètes faites à l’UNTM par courrier et par ordre du Premier ministre.
Pour finir, le gouvernement organisera une conférence sociale regroupant les syndicats, les employeurs publics et privés pour arriver « à un nouveau pacte social assorti d’un plan d’exécution, de suivi et d’évaluation ».
Mécanismes de Suivi – Evaluation
Il est également prévu la mise en place d’un comité indépendant de suivi-évaluation des résolutions et recommandations dans lequel tous les signataires seront représentés.
Un comité d’experts constitué, sera chargé de rédiger les projets de réformes politiques et institutionnelles issues du DNI pour servir de cadre de travail au Gouvernement et aux commissions désignées mais également de baromètre pour le suivi-évaluation recommandations préconisées.
La CEDEAO est officiellement sollicitée pour assurer la supervision, être en partie, le garant d’un mécanisme de suivi-évaluation de la mise en œuvre des clauses de ce nouvel accord politique de gouvernance, impliquant la société civile et devant aboutir à un nouveau pacte social entre le peuple, l’Etat, la société civile organisée, les partis et regroupements politiques.
Continuité – Réajustements |
En regardant de plus près, cette feuille de route semble vouloir compléter et consolider les acquits du DNI et de l’accord politique de gouvernance tout en prenant en compte les préoccupations majeures recensées au cours de ces dernières contestations.
Rappelons que l’APG (Accord politique de Gouvernance) signée le 02 mai 2019 pour une durée d’une année et qui aura permis d’arriver à une stabilité relative jusqu’aux dernières constatations post électorales suite aux résultats proclamés par la cour constitutionnelle.
Ce qui est d’autant plus intéressant, c’est que la partie gouvernementale est ouverte à la négociation autour de ce document mis à la disposition du M5-MFP bien avant l’arrivée des Chefs d’Etat de la CEDEAO afin que les parties maliennes puissent s’accorder sur l’essentiel.
. Dispositions finales |
Quant aux dispositions finales, cette feuille de route est prévue pour une période d’une année, et il en sera fait une revue trimestrielle et une évaluation à la fin de la durée d’exercice.
La validation et la signature de cette feuille de route est l’expression même de l’adhésion au principe du partenariat politique et technique pour des réformes profondes, et consensuel pour la stabilité.
Source : Lerepublicainmali