Démission d’IBK-Alliance avec les religieux-etat de la nation-négociations avec le gouvernement-enlèvement de Soumaïla Cisse : Choguel dit tout !

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Choguel kokalla Maiga
Choguel Kokalla MAIGA, le premier ministre de la transition

Président du MPR (Mouvement patriotique pour le renouveau), ancien ministre, Choguel Kokala Maïga, en absence de Soumaïla Cissé, assure aujourd’hui la présidence du FSD (Front pour la sauvegarde de la démocratie). A ce titre, il est l’un des initiateurs du M5-RFP (Mouvement du 5 juin du Rassemblement des forces patriotiques). Un Front qui exige la demission du Président Ibrahim Boubacar Keïta. Dans un entretien exclusif qu’il nous a accordé, Choguel revient sur la manifestation du 5 juin, la principale exigence du mouvement du 5 juin qui est la demission du Président IBK, les négociations en cours et/ou programmées pour obtenir l’aboutissement de cette revendication, les négociations avec le pouvoir et les partenaires du Mali. Aussi, il évoque également l’enlèvement de Soumaïla Cissé. Interview!

 L’Aube : Le FSD, CMAS et EMK avec d’autres partis et organisations de la société civile, ont demandé la démission d’IBK lors d’une manifestation le 5 juin dernier. Qu’est-ce qui motive cette exigence ?

Choguel Maïga : Ce qui motive cette exigence a été largement déclinée dans le communiqué de presse diffusé le 30 mai 2020 par la troika (FSD, CMAS et EMK). Dans ce document, nous avons répertorié l’ensemble des points qui font qu’aujourd’hui le peuple malien est arrivé à la conclusion que le régime qui gouverne le Mali ne peut pas donner de l’espoir aux Maliens. Le régime n’a plus la capacité de résoudre les problèmes des Maliens.

Rappelez-vous qu’en 2013, lorsque Ibrahim Boubacar Keïta arrivé au pouvoir l’espoir suscité aux Maliens, dans toutes leurs composantes, était la resolution de la crise du Nord. Mais, qu’est-ce que nous avons eu à la fin ? Plusieurs années après, la crise n’est plus au Nord, le Centre se trouve dans une situation de guerre civile. Le Nord est complétement délaissé par l’Etat, la crise sévit des toutes les regions du Mali. A la date d’aujourd’hui, à part le District de Bamako, aucune region n’échappe à l’insécurité. Lorsqu’un gouvernement ne peut pas assurer la sécurité de ses citoyens, lorsqu’il ne peut pas assurer l’école aux citoyens, ce gouvernement a un problème de légitimité. Voilà les raisons pour lesquelles nous avons estimé qu’après plus de 7 ans d’exercice du pouvoir, après plusieurs espoirs déçus, le peuple est arrivé à la conclusion que notre pays (qui devient de plus en plus la risée du monde entire) ne peut plus continuer dans cette situation. Ce sont les raisons principales qui nous ont conduit à la recherche d’une Union sacré de l’ensemble des forces patriotiques pour obtenir une rupture avec le système actuel.

Lorsq’un régime échoue dans sa façon de gouverner, il doit être sanctionné. Qu’est-ce que nous avons rémarqué ces dernières années ? Des élections sont de plus en plus frauduleuses et le résultat n’exprime pas la volonté populaire. Mais le plus grave c’est qu’on se retrouve avec une Cour constitutionnelle qui, sortant de ses prerogatives, decide d’organiser un troisième tour en se mettant à la place du peuple pour accorder des sufrages à des candidats ou en enlever à d’autres. Dans aucun pays du monde celà ne rentre dans les missions d’une Cour constitutionnelle. Donc, ce toisième tour organisé la Cour constitutionnelle a convaincu tout le monde qu’il n’est plus possible avec le système actuel d’accéder aux responsabilités par des élections démocratiques.

Et enfin, nous avons constaté lorsque les populations sont sorties pour manifester contre cette pratique, contre cet abus de pouvoir de la Cour constitutionnelle, le gouvernement a envoyé les forces spéciales antiterroristes pour tirer, pour mater les manifestations pacifiques à Sikasso. Je pense qu’après ça, les Maliens ont perdu toute illusion, tout espoir de compromis démocratique et pacifique avec le régime actuel. Voilà le fondement sur lequel repose la contestation actuelle au nom de l’ensemble des Maliens.

La démission du chef de l’État devrait, selon vous, être effective le 05 juin 2020 à 18 heures. Une semaine après IBK est toujours à son poste. Qu’envisager dans les jours à venir ?

Tout le monde sait que le Président Ibrahim Boubacar Keïta doit être en train d’évaluer la question. Notre espoir est qu’il parle désormais, après le rassemblement du 5 juin 2020. Je pense que le Président Keïta tirera les conséquences. C’est ce que nous avons dit qu’à l’expiration de cette date s’il n’y a pas de réaction, le peuple tirera les conséquences. Et l’une des conséquences, c’est qu’il y a eu une adhésion massive à notre mouvement qui a changé complètement de nature. D’une contestation, une remise en cause par trois organisations, c’est l’ensemble des forces politiques, sociales, des forces patriotiques qui sont en train de se donner la main. Un large front est en train de se constituer pour amener le chef de l’Etat à tirer les conséquences qui s’imposent.

Etes-vous en phase avec les Maliens pour faire aboutir vos revendications ?

Nous sommes des responsables politiques, des responsables d’organisation, de la société civile qui ont vocation à encadrer la société, à sensibiliser, à mobiliser, à conscientiser la population. Lorsque nous avons constater la dérive que je viens d’énumérer, nous sommes arrivé à la conclusion qu’il nous faut un Sursaut National et Patriotique.

Et lorsque nous nous sommes retrouvés, nous sommes convaincu que ce que nous demandons n’est pas trop. Le rassemblement du 5 juin a montré très clairement que cette exigence corresponde exactement à ce que les Maliens attendent, la suite c’est le peuple malien qui va décider. Nous avons initié une action, nous sommes convaincus qu’elle est bonne pour le salut Mali. Si le peuple ne nous suit pas nous en tirerons les conséquences et si le peuple nous suit massivement, je crois que les indications ont été données au rassemblement du 5 juin dernier, je souhaite vivement que le pouvoir en place en tire les leçons.

 Selon certaines informations d’autres partis politiques, organisations et de la société civile sont sur le point de vous rejoindre? Si Oui ? Lesquelles ?

Beaucoup d’organisations nous on déjà rejoint pas qu’elles son en train. Le lundi 8 juin 2020 déjà, beaucoup de partis politiques et d’associations sont venus, juste avant le point de presse exprimer leur adhésion à endosser les revendications rassemblement patriotique du 5 juin 2020. Ensuite, comme je l’ai dit plus haut, nous avons saisi d’autres forces politiques, tous les syndicats en République du Mali, toutes les organisations faitières, tous les partis et les associations à caractère politique, toutes les personnalités qui comptent au Mali et qui pour diverses raisons ne s’expriment pas ces dernières années. Nous avons décidé d’aller vers toutes ces forces qui s’organisent depuis des années, et qui contestent ce régime là. Et le chronogramme consiste à faire ce travail de ratissage et de rassemblement. Ce travail doit se faire d’ici le jeudi 11 juin pour une assemblée générale (aujourd’hui) afin d’élargir la base sociale, politique, sociologique de la contestation. A partir de cette assemblée générale, l’ensemble de ces organisations vont désormais endossées la déclaration du 30 mai 2020 et le communiqué final du 5 juin. Une fois que l’ensemble de ces forces élargies aura approuvé ces deux documents cadres, nous allons fixer ensemble la date de la prochaine grande manifestation.

Du côté du pouvoir, certains vous accusent de vouloir déstabiliser le régime, voire même un coup d’État. Qu’avez-vous à répondre ?

Du côté du pouvoir je crois qu’ils sont dans leur rôle. Ce discours, on l’a entendu plusieurs fois. Vous vous souviendrez qu’après les élections de 2018, lorsque l’opposition a considéré qu’elles ont été frauduleuses, certains ténors du pouvoir ont cru que c’était pour déstabiliser les institutions. De 1991 à maintenant, ça fait deux fois au moins que les hommes politiques (venus au pouvoir) l’ont été à la suite de putsch. Donc lorsqu’ils viennent donner des leçons, je pense que certains sont mal placés pour le faire. En toute état de cause, le mouvement en cours est un mouvement populaire qui résulte de l’échec, plusieurs fois constaté, du régime en place qui n’arrive pas à honorer ses engagements, dont le premier est de ramener la paix et la sécurité des personnes et des biens.

Notre pays est pris en otage par un pouvoir oligarchique et plutocratique. La seule voie que les Maliens ont, c’est de se mettre ensemble pour contrer le régime de façon pacifique. Et le caractère pacifique de ce mouvement a été annoncé dès le début.

C’est ce que j’ai à dire à ceux qui jouent avec les mots en qualifiant le mouvement patriotique de vouloir déstabiliser le régime, qui de toute façon, n’est que l’ombre de lui-même. Il est déstabilisé par lui-même, par son incompétence notoire, avérée, constatée et réconnue par tout le monde.

Le gouvernement vous invite au dialogue ? Êtes vous prêts à négocier ?

Nous avons bien sûre vue un communiqué. Il a été bien analysé au niveau de notre regroupement. Je pense que c’est un communiqué d’apaisement, dont je salue l’esprit. Mais qu’est-ce qui a à négocier en vérité ? Les exigences des forces patriotiques ont été clairement exprimées, il suffit de les prendre en compte. A la date d’aujourd’hui il m’est pas revenue qu’il y a tentative de discution quelque part.

 Êtes-vous prêt également à renoncer à votre principale revendication (la démission d’IBK) et dans quelles conditions ?

Le renoncement à la revendication populaire du 5 juin ne peut pas être remise en cause. En tout cas je n’ai pas mandat de le remettre en cause. C’est très clair dans l’esprit des uns et des autres, que ça va être un énorme gâchis, un énorme désespoir pour le people malien. Si, après avoir lancé un tel mot d’ordre au bout de trois jours nous renoncions à cette revendication alors que nous n’avons rien entendu du côté du pouvoir. Et donc s’il y a une discution à faire, le M5-RFP, me semble-t-il, est prêt à discuter de la mise en œuvre de sa revendication principale… Mais nous n’avons aucune réaction à notre revendication. Or, le pouvoir doit écouter le peuple. S’il a vu la masse qui était, il n’a pas encore compris le message des Maliens.

 Avez-vous eu des contacts avec certains partenaires du Mali notamment la MINUSMA ?

Nous (CMAS-FSD-EMK) avons été invités à une audience que l’imam Dicko a bien voulu accorder à des personnalités représentant la communauté international en République du Mali, la Minusma et la Cedeao. Ces personnalités (tous des africains de qualité) qui ont vécu au Mali, ont compris ce qui passe actuellement. Elles sont dans leur rôle, elles cherchent l’apaisement, la compréhension mutuelle entre les fils du Mali. Ces personnalités cherchent à stabiliser la situation, à renforcer les bases de la paix. Notre regroupement a assisté à cette audience, nous avons donné des explications, développé les arguments qui sont consignés dans la déclaration du 30 mai et dans le communiqué final du 5 juin.

 Quels sont les enseignements que vous tirez de la manifestation du 5 juin ?

Ces enseignements sont que le peuple a adhéré totalement sans reserve, massivement, de façon déterminée au mot d’ordre de la troika. C’est la grande leçon qu’on a tiré et nous sommes sortis totalement satisfait de cette manifestation qui a doublé l’élan patriotique, de solidarité des Maliens. C’est pourquoi depuis cette manifestation nous constatons une adhésion des partis politiques, des associations, des organisations professionnelles, de la société civile. ça été constaté le lundi 8 juin 2020 et le jeudi 11 juin, nous constaterons avec bonheur l’adhésion d’autres forces politique, d’autres forces sociales, d’autres personnalités pour amplifier le mouvement afin qu’on aboutisse à l’objectif recherché dans la paix et dans l’intérêt sûpérieur du Mali.

 On vous accuse (vous politiques) de composer avec des religieux et faire même leur jeu. Qu’en est-il ?

Ceux qui accuse notre regroupement (FSD-EMK) de composer avec les religieux ou de faire leur jeu se trompent d’époque, d’interlocuteur, de pays et d’analyse. La vérité est ceux qui nous accusent aujourd’hui de composer avec les religieux, ont été les premiers de le faire. Qui est le responsable politique au Mali à demander le concours des religieux ? C’est l’actuel Président de la République dès 2002. Qui ne l’a pas entendu en 2013 dire que les religieux n’accepteront pas qu’on lui vole sa victoire. Qui ne l’a pas vu se prosterner devant les chefs religieux. Qui n’a pas vu dans les mosquées des prêcheurs qui demandent de le soutenir. Pourquoi en se moment on n’a pas parlé de composer avec les religieux.

Je pense qu’il faut faire confiance au génie malien. Les uns et les autres se trompent, d’époque, d’analyse, d’interlocuteur. Nous sommes suffisamment enseignés par l’histoire de notre pays. Les chef religieux avec lesquels nous sommes aujourd’hui, notamment le grand chérif de Nioro est descendant d’une famille qui a résisté  pendant 70 ans à l’occupation coloniale. C’est l’une des rares familles qui n’ont jamais courbé l’échine face à l’oppression. Et c’est pour cela qu’elle est d’autant plus indigné, se sent responsable de l’accession au pouvoir du régime actuel, qui a déçu tous les espoirs. L’imam Dicko n’est pas à présenter aux Maliens, c’est l’un des hommes le plus instruit, le plus cultivé en République du Mali. Il connait l’histoire du Mali, il connait ce qui est possible dans ce pays ou ce qui n’est pas possible…

Donc vouloir nous impressionner, nous intimider, créer des complexes chez nous est une perte de temps. Nous faisons face au péril de déstabilisation et même de disparution de notre pays. C’est pour cela que nous parlons des patriotes. Les patriotes ne sont pas forcément de même obédience politique, religieux, et/ou philosophique. Ce qui nous unis, c’est de sauver le Mali ! Et dans cette union sacrée, toutes les forces politiques, sociales, sensibilsées et de cultes seront les bienvenues.

Voilà plus de 2 mois que le Président de votre regroupement (FSD) et chef de file de l’opposition Soumaila Cissé a été enlevé..Qui détient réellement Soumaila ? Quelles sont leurs revendications ?

Concernant la situation de notre Président Soumaïla Cissé qui a été enlevé, le 27 mars 2020. Vous avez suivis les activités du FSD, de l’URD, des parents de Soumaïla, particulièrement de son épouse, la brave Mme Cissé Aïssata Traoré. Nous l’avons vu tenir dans cette épreuve à Niafunké, conditionné les gens, les encouragés, à la date d’aujourd’hui elle continue de demander la bénédiction de tous. Elle continue à avoir le soutien de nous tous, de tous les Maliens. Notre Président sera libéré un jour j’en suis convaincu. Il aura un destin national tel qu’une bonne partie des Maliens ont voulu le lui confier. Mais en attendant, nous nous battons pour sa libération. C’est pour cela que dans toutes les revendications des forces patriotiques (M5-RFP) la libération de Soumaïla Cissé, fait partie des revendications au nom de l’ensemble du peuple malien, de la même façon que nous exigeons la fin de la corruption, nous exigeons la paix sur notre territoire, la sécurité, la santé… Mais pour l’instant nous ne savons pas qui sont les ravisseurs, ni les revendications qui sont posées. Je suis persuadé, je suis profondément convaincu que Soumaïla Cissé sera rendu à sa famille, à son parti, au FSD et au peuple malien.

Avez-vous un appel à lancer à ses ravisseurs ?

Ils doivent savoir ceci : Soumaïla Cissé est rentré dans l’histoire Mali. Pendant plus de trois élections (2002, 2013 et 2018), il a toujours été le challenger de celui qui a été Président de la République, quelque soit la nature des élections. ça veut dire que c’est une personnalité dans laquelle une bonne partie des Maliens se reconnaissent, qui cristalise l’espoir d’une bonne partie des Maliens. Donc qu’ils comprennent que maintenir Soumaïla Cissé en otage ne réglera rien. Ceux qui l’on enlevé qu’ils aient le courage de s’identifier, s’ils ont des conditions qu’ils les posent clairement. Pour libérer Soumaïla Cissé, le peuple malien n’hésitera pas, je pense, sur aucun moyen.

Soumaïla rendu aux maliens, Soumaïla présent dans les débats politiques permet d’ouvrir de nouvelles perspectives. Nous lançons un vibrant appel (au nom du FSD et du M5-RFP) de rendre Soumaïla Cissé aux Maliens.

Propos recueillis par

C H Sylla

Source : L’Aube

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