Dans une interview accordée le lundi 16 août à la chaîne TV5 Monde, le président du parti CODEM, Housséïni Camion Guindo, s’est prononcé sur la crise sociopolitique du Mali, notamment sur le processus de la transition. Il a insisté sur le respect de son délai et surtout la nécessité d’aller à une élection pour une paix durable.
TV5 : La situation de l’Afghanistan et celle du Mali sont-elles comparables ?
Housseini A. Guindo : D’abord, ce qui s’est passé en Afghanistan donne froid au dos. C’est une alerte pour le Mali. Mais, je ne pense pas que les situations soient forcément pareilles. Les Talibans étaient au pourvoir en Afghanistan, il y a 20 ans. Je crois qu’ils ont appris à diriger le pays. Ils savent ce qu’un État. Je pense qu’à la différence du Mali, ceux qui sont là aujourd’hui ne sont pas aussi organisés. Quand même, je pense que s’est un avertissement, une alerte.
Craignez-vous que les djihadistes prennent le pourvoir un jour ?
Il faut tout faire pour que cela n’arrive pas un jour. Parce qu’il est important que notre pays, qui est aussi divers en termes de communautés, de cultures, de religions qui fondent notre socle national, puisse résister. Je pense que cela sera évité au Mali.
Il y a de cela une semaine, vous êtes allé à la rencontre de la diaspora malienne. Pour quelle raison ?
Je suis venu échanger avec la diaspora pour dire ce que nous savons de ce qui se passe dans notre pays. Ensuite, écouter cette diaspora. Vous savez, ceux qui sont là sont des ruraux. Ce n’est pas des citadins… Aujourd’hui, le Mali est touché dans le milieu rural. Quand on parle de 70% ou de 80% d’occupation, c’est surtout dans le milieu rural. Ce n’est pas le milieu citadin.
Ceux qui viennent ici, c’est pour soutenir l’économie rurale qui, aujourd’hui, plus que jamais, est à terre. Donc, il est important, puisqu’ils sont là pour apporter à manger à la population restée au Mali notamment dans le milieu rural. C’est ce milieu qui est atteint. Donc, il est important de venir échanger avec eux.
Quel message, vous leur avez donné ?
Le message donné est de se donner la main. Ceux qui sont touchés par la crise, qui vivent ou qui mesurent réellement l’ampleur de la crise, se donnent la main pour réorienter la gouvernance. Permettre aux enfants, sortis des entrailles de ce peuple-là, de diriger le pays. Que ceux qui sont là, dans le milieu rural, puissent se reconnaître en l’État et désormais être les alliés de l’État. Puisqu’aujourd’hui, ils préfèrent être alliés aux terroristes qu’à l’État. Tout simplement, parce qu’ils ne se reconnaissent pas en ceux qui dirigent le pays.
Vous serez candidat à la prochaine élection présidentielle au Mali ?
Normalement ! Nous nous sommes présentés pendant les élections précédentes. Aujourd’hui, nous avons une coalition de 21 partis politiques avec 05 ONG et beaucoup d’associations. Avec comme objectif de veiller sur la transition, et de nous organiser pour la prochaine échéance électorale.
Les 7 mois seront-ils suffisants pour mettre en œuvre les mesures annoncées dans le plan du nouveau gouvernement de la transition ?
«À l’impossible nul n’est tenu». Le plan est énorme mais l’objectif principal est d’aller à cette élection. Nous préférons prendre les dirigeants au mot, au serment qu’ils ont prêté. La parole donnée est importante chez nous. Nous espérons qu’ils trouveront les moyens d’être dans le délai, et, surtout, de respecter le serment pris.
Abdoulaye Diop a déclaré travailler à respecter la date des élections. Mais, selon lui, tout dépendra de l’évolution du terrain. Vous partagez-vous son point de vue ?
Je préfère m’en tenir au serment. Puisque le serment est plus important que tout cela, le serment du président de la transition et l’engagement du Premier ministre. Le Premier ministre, dans sa déclaration de plan d’action gouvernemental, a bel et bien précisé qu’il resterait dans le délai. Donc, je pense que ce que le ministre des Affaires étrangères a dit n’est pas à prendre en compte.
Que proposeriez-vous pour que l’État malien prenne toute sa part dans ses engagements régaliens ?
Nous sommes sur le banc de la communauté internationale, autant nous sommes sur le banc de la communauté nationale. L’État ne parvient pas à assumer son rôle régalien à l’intérieur. L’Etat est pris en étau. En étau à l’intérieur avec les groupes terroristes, et, aussi sur le banc de la communauté internationale.
Nous ne pouvons pas sortir de cette situation si nous n’éliminions pas les problèmes. Il faut d’abord la légalité constitutionnelle au moins pour que le Mali puisse bénéficier de toutes les potentialités sur le plan international. Et, ensuite, faire face aux problèmes internes. Ça fait un an que nous sommes dans la transition. Je ne pense pas que la transition soit là pour régler les problèmes.
Abou Ouattara/Stagiaire
Source : Le Wagadu