Réhabiliter la Haute Cour de Justice dissoute dans le sillage du renversement de l’Assemblée nationale avec le régime d’IBK. C’est la tournure rocambolesque prise par les pirouettes entretenues par certaines tendances du Conseil National de Transition. Instauré pour combler le vide parlementaire et assurer le salut public, cet organe législatif d’exception se donne des ailes et excelle plutôt dans le superflu par des orientations spectaculaires de ses missions.
Après l’épouvantail d’une certaine commission d’enquête sur les bâtiments publics vendus, il se mijote depuis quelque temps des manœuvres prestidigitatrices pour faire ressusciter la seule institution habilitée à juger les anciens présidents de la République et les anciens ministres. Selon certaines confidences, en effet, le dixième nécessaire de membres de l’organe législatif de Transition s’est pour l’heure seulement constitué autour de cette intention, mais d’autres sources sont formelles quant à une saine déjà effective des juges constitutionnels aux fins de requérir leur avis sur une Haute Cour de Justice émanant du CNT. Quoi qu’il en soit, ce n’est visiblement pas pour les seuls privilèges liés à la huitième institution que sa réhabilitation est souhaitée où sollicitée. En attestent, en tout cas, les couleurs précédemment annoncées par des membres de l’organe législatif ayant outrepassé la vocation transitionnelle du CNT par leur insistance sur l’ouverture d’enquêtes parlementaires sur des affaires pendantes devant la justice où déjà vidées par celle-ci. Idem pour les déclarations aussi sentencieuses que rageuses de responsables du même organe, qui ont pour certains déjà prononcé leurs verdicts et désigné leurs coupables en la matière.
Tout porte à croire, en définitive, que l’installation de la Haute Cour de Justice, contre tant d’évidences de son inopportunité, préfigure la même posture velléitaire d’instauration d’une justice des vainqueurs, au détour d’une lutte contre anti-corruption qui s’allient de frustrations populaires entretenues et attisées aux dépens de brebis galeuses et moutons noirs de la République désignées d’avance. Au nombre desquels figurent de sérieux prétendants à la magistrature suprême probablement prédestinés aux mailles d’une justice populaire en gestation, dans le dessein fort probable et inavouable de soustraire certains gênants et redoutables adversaires du jeu politique à venir. La manœuvre ne devrait normalement pas résister à la logique des choses. Et pour cause, la Cour Constitutionnelle, principale référence dans sa faisabilité, n’avait pas agréer le titre de député aux membres du CNT en vérifiant la constitutionnalité du règlement intérieur de cet organe législatif. Or il est clairement stipulé noir sur blanc dans la constitution que la Haute Cour de Justice est composé de députés.
Mais, par-delà le légalisme pur et dur, la sagesse, autre caractéristique et boussole vertueuse des membres de la Cour constitutionnelle, commande de ne pas cautionner l’instauration d’une justice populaire, au risque d’hypothéquer davantage les chances de réconciliation dans pays en quête de sa stabilité égarée dans la profondeur des contentieux historiques encore insoluble.
A KEÏTA
Source : Le Témoin